Nous publions in extenso l’analyse de l’ancien premier ministre, Raymond Ndong Sima sur la taxe municipale sur l’activité de transport terrestre.
Une taxe discriminatoire
Le vote de résolutions dans les conseils municipaux instituant des taxes sur les activités de transport terrestre s’est inspiré des taxes aéroportuaires sur les billets d’avion des passagers. Il s’est agi là d’une erreur épouvantable due à une assimilation erronée de situation qui ne sont en rien comparables.
Dans les aérogares, de très importantes infrastructures sont réalisées et s’adressent directement au confort des passagers et à leur sécurité. Dans le transport terrestre interurbain au Gabon de telles installations n’existent pas. Il n’existe ni gare, ni toilette publique ni aucune espèce de commodité destinée à assurer un minimum de confort aux voyageurs qui, pour l’essentiel, embarquent le long des rues et autres espaces choisis et aménagés par les transporteurs eux mêmes.
Ces résolutions introduisent de graves discriminations par rapport au citoyen et par rapport au capital investi. Ainsi et pour faire simple :
– L’achat de certains biens et services tels que le transport terrestre d’un point à un autre du pays soumet certains citoyens à une taxe c’est à dire à une dépense supplémentaire ;
– Mais l’achat d’un paquet de cigarettes dans n’importe quelle échoppe de la ville qui nuit pourtant gravement à la santé n’est pas concerné par cette taxe.
Donc, être de l’intérieur du pays et s’y rendre pour quelque raison que ce soit (décès, mariage, loisir) soumet celui qui est originaire de ce lieu de l’intérieur ou qui s’y rend pour quelque raison que ce soit à une dépense additionnelle en plus du coût de son déplacement. De même :
– Un investisseur qui réunit 20 millions et s’achète un minibus qu’il affecte au transport entre la capitale et une ville de l’intérieur doit non seulement payer sa patente mais aussi devenir le collecteur pour le compte de la mairie d’une taxe sur le déplacement de tout citoyen partant d’un point à un autre du pays à bord de son bus.
– Un autre investisseur réunit 20 millions ouvre un magasin à Libreville ou à Oyem ne voit pas ses charges d’exploitation augmenter (pour tenir cette comptabilité additionnelle).
C’est déjà si lourd de mener de front la gestion de la résidence du lieu de travail et celle du village auquel on veut rester attaché. C’est encore plus cher désormais. Et que feront les villes traversées par ces bus? Le Gabon reste t-il bien un et uni ou bien a-t-on ouvert la porte à son morcellement?
La taxe votée dans la loi de finances de 2009 est discriminatoire et comme telle, contraire à la Constitution. La résolution votée dit que celui qui monte dans un bus pour aller de Libreville à Ntoum et au-delà doit payer une taxe mais celui qui entre dans n’importe quel supermarché de Libreville, n’importe quel marché, n’est pas assujetti à une telle taxe. Il y a là deux poids et deux mesures et chacun le sait, une telle discrimination n’est conforme ni à la lettre ni à l’esprit de la République.